Livre: Ils viennent d’Amérique pour bâtir l’Ile de Pâques

Ils viennent d’Amérique pour bâtir l’Ile de Pâques, 

 par Joseph Davidovits

ISBN: 979-10-242-0610-3, 265 pages, 172 illustrations, 

publié en Juin 2021, éditions Dervy, Groupe Guy Trédaniel, Paris.

Résumé:
Livre de vulgarisation scientifique sur la Découverte en 2017-2018 de l’emploi des technologies des pierres Géopolymères mises en œuvre à Tiahuanaco (Pumapunku/Tiwanaku) (600-800 apr. J-C.), Bolivie, et ses conséquences possibles sur les monuments et statues de l’Ile de Pâques. Voir l’article à Tiahuanaco-Pumapunku et dans Research Gate Research Gate publiés en Août – Septembre 2019 et Décembre 2020.

1. Introduction, présentation de la recherche et des objectifs.

L’institut Géopolymère avait organisé une expédition à l’Ile de Pâques en 2016 qui fut dirigée par Ralph Davidovits. L’objectif était de faire le point sur une recherche commencée il y a 40 ans par Joseph Davidovits (Davidovits et Aliaga, 1981) puis abandonnée, par manque d’information cohérente sur la nature artificielle  (géopolymère) ou naturelle des différents monuments et statues de l’ile. Maintenant, avec notre connaissance de la science des géopolymères, il nous semble évident qu’ils furent fabriqués avec la technologie de la pierre malléable, comme dans la tradition sud-américaine du Pérou, et autre site de l’Altiplano, dans les Andes de l’Amérique du Sud. 

La première visite en 2016 fut pour le site de Vinapu à l’Ile de Pâques. C’est un site très connu qui est l’objet d’une polémique, surtout depuis l’expédition Kon-Tiki de Thor Heyerdahl en 1947 qui traversa l’océan Pacifique d’est en ouest sur un radeau de balsa, venant du Pérou. Tous les visiteurs sont frappés par la ressemblance dans la construction du mur de Vinapu avec ceux de l’Altiplano (Figure 1) et nous serions d’accord pour une première migration venant de l’est, de l’Amérique du Sud. Puis, les Polynésiens auraient conquis l’île, venant de l’Ouest. Il y aurait donc un possible lien entre ces deux civilisations, l’une venant de l’est et l’autre de l’ouest. 


Figure 1: architecture avec “clé” de stabilité; à gauche, mur de fondation de la pyramide Akapena de Tiwanaku (600 apr. J.-C.) (cliché RD, 2017); à droite, mur de l’ahu Vinapu à l’Ile de Pâques (850-950 apr. J.-C.) (cliché RD, 2016).

Mais, c’est un sujet tabou pour les responsables de la recherche archéologique à l’ile de Pâques. Il semble qu’il soit interdit d’exprimer une telle opinion. Toute la recherche archéologique actuelle est biaisée par cette position. Donc, si nous voulons démontrer cette interrelation, à savoir que la connaissance est arrivée par l’est, nous devons tout d’abord retrouver et expliquer scientifiquement celle des bâtisseurs des mégalithes précolombiens de l’Altiplano. Ensuite, nous aurons le loisir de revenir sur le dossier de l’Ile de Pâques. 

Pour cela, il fallait commencer par un endroit de l’Altiplano où nous avons pu examiner des échantillons et où l’étude géologique, minéralogique avait été faite en partie par des scientifiques géologues, archéologues, anthropologues. Ce site archéologique est celui de Tiahuanaco, en Bolivie, près du Lac Titicaca, plus précisément le site de Pumapunku / Tiwanaku. L’étude pétrographique réalisée par l’équipe de géologues boliviens autour de Ponce Sangines (Ponce Sangines et al., 1971) a servi de point de départ. Elle portait essentiellement sur la description des différents gisements de grès rouge situés dans les environs de Tiahuanaco, et sur l’analyse pétrographique des 4 terrasses monumentale en grès (Figure 2).

L’Institut Géopolymère à donc organisé l’année suivante, en 2017, cette exploration à Tiahuanaco (Pumapunku/Tiwanaku), près du Lac Titicaca situé en Bolivie à 4000m d’altitude en collaboration avec un géologue de l’Universidad Catolica San Pablo UCSP d’Arequipa, Pérou.  

2. Le livre est divisé en 2 parties.

2.1 1ère Partie, Chapitres 2 à 9: Pumapunku/Tiahuanaco, Bolivie. 

Elle décrit la découverte des technologies des pierres artificielles géopolymères mis en œuvre dans les Andes, sur l’Altiplano. Elle fut publiée à la fois dans des articles scientifiques, Davidovits et al. (2019a,b,c), Gara et al. (2020), et des vidéoconférences sur internet (au total plus de 1 million de vues).

Figure 2: Pumapunku. À gauche, une des terrasses monumentales en grés géopolymère de type ferro-sialate; à droite, structure “H”, roche andésite  géopolymère de type organo-minéral, obtenu en milieu acide (acide phosphorique et acides organiques), contenant de la matière organique biologique (RD 2017).

La Figure 2 illustre les 2 types de roches géopolymères employés à Pumapunku: 

  • le grès rouge de type géopolymère ferro-sialate (milieu alcalin) pour les énormes terrasses (Davidovits et al., 2019a), et 
  • l’andésite grise pour les structures en “H” et les portes, géopolymère de type organo-minéral (milieu acide) contenant de la matière organiquebiologique (Davidovits et al., 2019b). 

Ainsi, pour comprendre l’histoire et la technologie employée par la civilisation de Pumapunku/Tiwanaku, l’anthropologie a vite compris que la seule façon d’y parvenir était d’étudier l’évolution de l’art de la poterie, de la céramique, du travail de l’argile. Parmi les anthropologues, je citerai John Wayne Janusek, de Vanderbilt University, USA (Janusek, 2008). Avec lui, nous avons découvert comment soudainement, vers 500 apr. J.-C., on passe de la production d’une vulgaire terre cuite à celle d’une céramique que j’ai qualifiée de « high-tech » dans le Chapitre 4. Dans son livre, Janusek écrit : (…) Tiwanaku 1, datant de 500-800 apr. J.-C., commence par l’apparition soudaine d’une nouvelle gamme de poteries élaborées et à engobe rouge (redware). En rupture avec la fin de la deuxième période formative (la civilisation avant 500 apr. J.-C.), pratiquement tout le monde avait désormais accès à des récipients en céramique très élaborée pour la consommation domestique et les festins. (…).

Cette céramique « high-tech » de Tiwanaku est illustrée dans la Figure 3. Elle serait le résultat d’une technique proche de la technologie céramique géopolymère LTGS (Low Temperature Geopolymeric Setting). Elle est parfaitement adaptée aux conditions de fabrication des céramiques de qualité supérieure fabriquées à basse température, inférieure à 600°C, qui sont celles des températures de cuisson dans ces régions de l’Altiplano: combustible essentiellement à base de bouse de camélidé (lama) et broussailles. Elle est si caractéristique et si unique dans la région qu’elle servit d’instrument précis de datation dans plusieurs chapitres de ce livre.

Figure 3: a) à gauche, coupe à paroi épaisse, période ancienne (200 apr. J.-C.); b) au milieu, le kero et c) à droite, coupe multicouleur rouge tazon (500 apr. J.-C.), à paroi très fine et très solide de céramique de type LTGS (Museo Nacional de Arqueología Tiwanaku, La Paz, 2017).

2.1.1 Blocs de grès rouge

À partir de la céramique LTGS, les artisans de Pumapunku/Tiwanaku ont été capables d’extrapoler et d’inventer la technologie des blocs et structures en roches géopolymères. Les blocs géants de grès rouge sont décrits dans le chapitre 5. Le grès est une roche sédimentaire composée de grains de quartz et d’un liant argileux. Selon Ponce Sangines et al. (1971), il existe plusieurs sources géologiques possibles pour son origine. Elles sont décrites au chapitre 6, mais  aucune d’entre elles ne correspond aux pierres qui font partie du site archéologique. 

Aucune carrière connue, parmi celles que notre équipe a étudiées sur le terrain en novembre 2017, ne peut fournir les blocs massifs de 10 mètres de long et de 130-180 tonnes, qui forment ces structures. De plus, la pierre locale disponible pour cette tâche est friable et de petite taille. Notre enquête au microscope électronique nous a indiqué que le grès rouge de Pumapunku ne peut pas provenir de la région, car il contient des éléments chimiques (haute teneur en sodium Na), qui ne sont pas présents dans la géologie locale. La question est alors de savoir d’où vient la pierre, à combien de centaines ou de milliers de kilomètres de là a-t-elle été trouvée, par quel moyen ces énormes blocs ont-ils été transportés ?

Ce que l’analyse au microscope électronique nous montre, c’est que la composition du grès pourrait être artificielle (un géopolymère de ferro-sialate) et fabriquée comme du ciment.

2.1.2 Blocs de type “H” et portes monolithes en andésite volcanique.
Le principal composant des structures les plus énigmatiques de Tiwanaku/Pumapunku, la Porte du Soleil et les blocs « H » (Figure 2), est l’andésite, une roche volcanique dérivée du magma. Dans le Chapitre 7, grâce aux travaux d’un autre anthropologue céramiste, William Isbell, State University of New York at Binghamton, USA, cette même céramique « high-tech » LTGS nous a permis de découvrir, de dater et de comprendre quelle était la matière volcanique utilisée dans la roche andésite géopolymère constituant les grandes portes et les structures en « H » de Pumapunku. Il s’agit d’un sable volcanique extrait du volcan Cerro Kapia. 

L’examen d’échantillons de blocs au microscope électronique MEB, montre la présence de matière organique biologique à base de carbone (C) et d’azote (N). Cependant, nous savons que la matière organique biologique n’existe pas dans une roche volcanique formée à haute température, car dans ces conditions, elle se serait vaporisée, de sorte qu’on ne pourrait pas la trouver dans l’andésite des monuments de Pumapunku. Cet élément organique, un géopolymère à base d’acides carboxyliques extraits de plantes et autre biomasse, a donc été délibérément ajouté par la main de l’homme pour former une sorte de ciment.

Ce faisant, nous avons résolu un des mystères archéologiques les plus discutés au monde. Nos découvertes de la nature artificielle des roches employées dans les monuments de Tiwanaku/Pumapunku furent publiées dans les journaux scientifiques à comité de lecture Materials Letters et Ceramics International, fin 2018 — début 2019. Ces publications générèrent une forte audience sur internet, avec plus d’un million de vues sur les vidéos décrivant nos recherches, en particulier en Amérique latine. Nous savons comment les monuments de Pumapunku, les terrasses mégalithiques en grès rouge et les fantastiques éléments structuraux en forme de « H » en andésite, furent façonnés à l’aide de techniques de fabrication de roches artificielles, proches et apparentées à celle des géopolymères. Cette nouvelle connaissance pourra être utilisée pour comprendre comment des ouvrages encore plus impressionnants furent construits pendant cette même période ou après. Je fais allusion évidemment aux énormes murailles de Sacsayhuaman à Cusco, au Pérou, ainsi que d’autres monuments de par le monde. 

2.2 2ème Partie, Chapitres 10 à 12: Ils viennent d’Amérique pour construire l’ile de Pâques. 

Y a- t-il un lien avec une civilisation venue de l’Est ? J’ai essayé de clarifier et de décrire mon hypothèse sur ce sujet dans les chapitres 10 à 12. 

Tout le monde connaît l’ile de Pâques et ses statues. Le problème c’est qu’il n’y en a pas 1, ou 2 ou 10, mais des centaines. On en compte environ 800 pesant entre 5 tonnes et 20 tonnes et ayant jusque 10 mètres de hauteur. Comment cette population qui a compté au maximum 4000 habitants, lors de sa découverte en 1722, a-t-elle pu produire ce nombre invraisemblable de statues colossales ? On nous explique que ces statues ont été taillées dans de la roche volcanique et transportées depuis le volcan, montées sur les terrasses avec des techniques que chacun essaye d’appliquer sans succès. Évidemment, on nous propose des tas de solutions avec des cordes, et des poutres, d’autres utilisent l’aide des extraterrestres, mais tout ceci constitue un ensemble qui dépasse l’entendement normal. 

Le livre explique l’hypothèse de la nature artificielle de ces roches volcaniques utilisées dans la réalisation de ces statues; c’est-à-dire qu’au lieu d’avoir été transportées et taillées, elles ont été fabriquées sur place à l’aide de technologies géopolymères en milieu acide (extraits de biomasse). Avec ce raisonnement et ce nouveau paradigme, nous comprenons ce qu’il s’est passé sur cette ile et nous nous demandons d’où vient cette connaissance. Qui ? Quand ? Comment?

Figure 4: Ile de Pâques; à gauche, statues de type Chemamülles plantées sur le flanc du volcan Rano Raraku; à droite, statues de type Moai sur l’ahu Tongariki(2016).

En me basant dans le Chapitre 10 sur les travaux d’un troisième céramiste anthropologue, Mauricio Uribe, Universidad de Chile, Santiago, Chili, (Uribe et al., 2004) c’est également cette céramique “high-tech” LTGS qui permit de démontrer comment des prêtres exilés de Tiwanaku/Pumapunku se lancèrent dans l’aventure vers l’Ouest depuis Arica, sur la côte de l’Océan Pacifique. C’est ainsi qu’en naviguant sur l’océan, ils seraient devenus les premiers habitants de l’Île de Pâques vers 800-900 apr. J.-C. Ils auraient bâti le mur de Vinapu (850-950 apr. J.-C.). Cette connaissance a été apportée dans l’ile de Pâques, non pas par les Polynésiens, mais par les Amérindiens, les Américains du Sud venant des Andes, de l’Altiplano, de la région de Cuzco, de Tiahuanaco (Pumapunku/Tiwanaku) situé dans l’actuelle Bolivie.

Ensuite, des Mapuches venant du Chili (1000-1100 apr. J.-C.) auraient commencé à planter leurs statues Chemamülles dans les flancs du volcan Rano Raraku. Ces statues Chemamülles seraient la réplique des grandes statues en bois que les Mapuches sculptaient au Chili. Mais, ici, à l’Ile de Pâques, le tronc du palmier n’est pas approprié car fibreux. Ils ont donc inventé la statue en pierre. Les Polynésiens seraient arrivés après (vers 1150-1200). Ils auraient adapté la technologie géopolymère développée par les Amérindiens et auraient fabriqué les statues Moai posées sur les ahus (Figure 4). 

Les rares études pétrographiques réalisées sur les Moai montrent au MEB la présence de micro-organismes (bactéries) fossilisés dans la roche volcanique (Hyvert, 1973) (Figure 5). Cela suggère l’emploi de géopolymère de type organo-minéral, obtenu en milieu acide, comme à Pumapunku.

D’un autre côté, l’analyse du sol à l’intérieur du volcan Rano Raraku (Sherwood et al., 2020) met en évidence une pollution chimique regroupant plusieurs éléments: potassium (K), phosphore (P), calcium (Ca), phytholites (SiO2) provenant d’ajouts volontaires de matières organo-minérales effectués par les habitants (Figure 5). Cela pourrait évoquer la mise en place d’une unité de fabrication géopolymère, de type organo-minéral.

Figure 5: à gauche, photos au MEB de micro-organismes fossilisés en forme de tonnelet (statues de l’Ahu Tongariki), échelle 5 microns, d’après G. Hyvert (1973); à droite, les valeurs recommandées, moyennes et maxima mesurées pour le pH, le phosphore (P), le calcium échangeable (Ca), le potassium (K), dans le sol, statue Nr. 156, caldéra du volcan Rano Raraku, d’après Sherwood et al., (2019); les valeurs mesurées sont extrêmement élevées et elles indiquent une pollution chimique du sol.

3. Conclusion.

Dans ce livre, je conte plusieurs aventures humaines qui se succédèrent sur plus de 300 ans entre 850 av. J.-C. et 1200 av. J.-C. Tout ceci se passe 600 ans avant les Incas. Grâce aux travaux de différents anthropologues américains et chiliens, j’explique comment les peuples sud-américains auraient échoué sur l’ile. Aucune des deux civilisations étudiées dans ce livre, celle d’Amérique du Sud à Tiahuanaco, Bolivie, dans l’Altiplano, qui eut son apogée entre 600 et 800 apr. J.-C. et celle de l’Ile de Pâques, qui prend le relai à partir de 800-900 apr. J.-C., n’a transmise d’information par le biais d’un système d’écriture, de texte ou de gravure. C’est le silence le plus total. Il m’a fallu donc « prendre conscience de beaucoup de choses », c’est-à-dire faire preuve d’ingéniosité. J’ai réussi à relier l’impossible et le défendu, l’impossible en démontrant la forte relation existant entre les Andes de l’Amérique du Sud et l’Ile de Pâques, le défendu en établissant que les premiers occupants de l’ile furent des Américains, bien avant les Polynésiens.

Notre étude démontre que ces composants architecturaux ont pu être façonnés avec une technique de moulage en géopolymère au sable humide. Plus vraisemblablement, il s’agissait d’une préforme obtenue par moulage. Puis, avant que le géopolymère ne soit complètement durci, alors qu’il était encore mou et facile à travailler, il aurait été sculpté avec les outils classiques de l’époque : en bois, en pierre, en obsidienne. 

Enfin, notre découverte scientifique confirme les légendes locales du Pérou que l’ethnologue péruvien Francisco Aliaga m’avait présentées il y a quarante ans (Davidovits et Aliaga, 1981). Cette tradition sud-américaine indique que « les pierres ont été faites à l’aide d’extraits de plantes capables de ramollir la pierre ». Cette explication a toujours été rejetée par les archéologues, car elle n’avait pas de sens. Les preuves apportées par notre équipe de scientifiques de France et du Pérou montrent que la tradition orale avait raison : ils faisaient des pierres molles qui pouvaient durcir ! L’hypothèse des anciennes super-civilisations perdues ou des extraterrestres est fausse. C’étaient des homo sapiens, des humains intelligents. Ils connaissaient parfaitement leur environnement et savaient exploiter les ressources apportées par la nature. 

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Les traductions du livre en langue espagnole et en langue anglaise sont disponibles. 

Nous cherchons un éditeur pour chacune de ces langues.